Le droit d’auteur en musique est séparé en deux droits : le droit moral et le droit patrimonial.
La notion de droit en musique est fondamentale et complexe. Les acteurs sont nombreux à intervenir que ce soit dans la création, l’édition, la diffusion, l’exploitation etc. De plus, dans un contexte de téléchargement illégal, de streaming ou encore l’essor des musiques dîtes « libre de droits », il est nécessaire de bien maitriser ces notions.
1- L’histoire du droit d’auteur
En France, c’est au XVIII ème siècle qu’apparaissent les premières lois sur le droit d’auteur, suite à la révolution. La première en 1791 concerne le droit pour l’auteur d’autoriser ou d’interdire la reproduction de leurs oeuvres en public durant leur vivant. La seconde en 1793 leur donne ensuite le droit exclusif de vendre, faire vendre et distribuer leurs ouvrages pendant leur vivant.
Ces deux lois ont ainsi régi pendant 150 ans les prémices des droits de représentation et de reproduction d’aujourd’hui.
Ensuite, c’est véritablement la loi du 11 mars 1957 qui reconnait le droit moral et le droit patrimonial aux auteurs.
En 1985, la loi accorde les droits voisins aux artistes, interprètes et producteurs.
Ces deux lois sont enfin abrogées en 1992 et incorporées dans le code de la propriété intellectuelle.
Au niveau international, c’est la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques en 1886 qui a marqué un tournant. Elle permet d’harmoniser la protection des auteurs dans les pays signataires. Ainsi, un auteur est protégé dans un état de manière identique à son pays d’origine.
La convention a été révisée de nombreuses fois. En 1948, elle intègre notamment la protection de l’auteur jusqu’à 50 ans après sa mort.
Certains pays ont mis longtemps à l’intégrer. C’est notamment le cas des Etats-Unis qui l’on fait en 1989 seulement.
2-Le droit moral
Le droit moral est la spécialité Made In France que tous les auteurs du monde entier nous envient. Ce droit est rattaché à la personne, en l’occurence le(s) auteur(s) d’une oeuvre. Il regroupe 4 droits :
Droit à la divulgation
Il indique que l’auteur peut choisir de rendre public ou non son oeuvre, par tous les procédés de son choix.
Droit de retrait et de repentir
Enfin, avec ce droit, l’auteur pourra retirer ou cesser l’exploitation d’une oeuvre.
Droit à la paternité
Il implique que son nom et sa qualité (auteur, compositeur etc.) soient indiqués sur tous les supports. Il peut choisir de le faire sous son nom ou sous un pseudonyme.
Droit au respect de l’oeuvre
Très important, le droit au respect de l’oeuvre permet à l’auteur d’autoriser ou non toute modification, transformation, coupure, changement de destination etc.
En outre, le droit moral est fondé sur 4 piliers fondamentaux :
Perpétuel
La durée du droit moral est illimité. Elle n’a par conséquent aucune durée dans le temps contrairement aux droits patrimoniaux.
Imprescriptible
Il ne peut pas être effacé dans le temps.
Inaliénable
Ce droit ne peut être cédé à un tiers durant la vie de l’auteur. Tout contrat qui stipulerait le contraire serait donc nul.
Transmissible
Par défaut, il est transmis aux héritiers à la mort de l’auteur appelés « ayants droits ». Il peut être transmis à un tiers par testament, appelé alors « ayant cause ».
On va fluncher… ou pas !
Pour illustrer ce droit moral, prenons donc un exemple connu : « On va fluncher ».
L’oeuvre originale écrite par Didier BARBELIVIEN, composée par Gilbert MONTAGNE et éditée par Universal Music Publishing a été utilisée par l’enseigne Flunch. Ainsi, son célèbre slogan « on va fluncher » a permis à la marque de réaliser ses campagnes de communication et d’accroître sa notoriété.
Pourtant, les auteurs avaient cédé à l’éditeur le droit d’exploitation de l’oeuvre sur d’autres supports comme la publicité, incluant la modification des paroles.
Cette cession des droits patrimoniaux (voir ci-après) s’est donc faite à travers le contrat de cession et d’édition.
Décision de justice
Les deux auteurs ont ainsi portés plaintes contre la société de publicité et les diffuseurs faisant valoir leur droit moral lorsque l’enseigne a utilisé « on va fluncher » dans le cadre de ses campagnes TV.
La Cour de cassation a porté 3 arrêtés et c’est le dernier qui donna raison aux auteurs. Ainsi, le motif retenu est la « substantielle modification » de l’oeuvre, évoquant l’aspect « inaliénable » d’une oeuvre en droit français :
– Attendu que l’inaliénabilité du droit au respect de l’œuvre, principe d’ordre public, s’oppose à ce que l’auteur abandonne au cessionnaire, de façon préalable et générale, l’appréciation exclusive des utilisation, diffusion, adaptation, retrait, adjonction et changement auxquels il plairait à ce dernier de procéder ;
– Attendu qu’après avoir exactement retenu que dès lors qu’elle emportait un tel abandon la clause de cession litigieuse était inopposable à Didier BARBELIVIEN et Gilbert MONTAGNE, la cour d’appel, constatant que l’adaptation contestée, qui constituait une parodie des paroles de la chanson « on va s’aimer » sur la musique originale de l’œuvre, dénaturait substantiellement celle-ci, en a déduit, à bon droit, que, en l’absence d’autorisation préalable et spéciale de Didier BARBELIVIEN et Gilbert MONTAGNE, une telle adaptation à des fins publicitaires, portant atteinte à leur droit moral d’auteur, était illicite ; qu’elle a ainsi, sans encourir aucun des griefs du moyen, légalement justifié sa décision.
Le droit moral en France est donc un droit fondamental, qui protège l’auteur et ses oeuvres comme nulle part dans le monde. Avec ce droit, l’auteur a par conséquent une main mise sur l’exploitation de son oeuvre durant toute sa vie, une sorte de veto, ce qui lui confère une véritable protection.
3-Le droit patrimonial
Les droits patrimoniaux s’opposent au droit moral en ce sens où ils sont cédés contre rémunérations.
On les distingue en 2 catégories : le droit de représentation et le droit de reproduction (dont adaptation).
Droit de représentation
L’article L122-2 du code de la propriété intellectuelle définit comme suit :
La représentation consiste dans la communication de l’oeuvre au public par un procédé quelconque, et notamment :
1° Par récitation publique, exécution lyrique, représentation dramatique, présentation publique, projection publique et transmission dans un lieu public de l’oeuvre télédiffusée ;
2° Par télédiffusion.
Plus généralement, on parle de représentation lorsque l’oeuvre et jouée en live, et d’exécution publique lorsqu’elle est diffusée en radio, TV, streaming etc.
Droit de reproduction
L’article L122-3 du code de la propriété intellectuelle le définit comme suit :
La reproduction consiste dans la fixation matérielle de l’oeuvre par tous procédés qui permettent de la communiquer au public d’une manière indirecte.
Elle peut s’effectuer notamment par imprimerie, dessin, gravure, photographie, moulage et tout procédé des arts graphiques et plastiques, enregistrement mécanique, cinématographique ou magnétique.
On parle de reproduction « mécanique » pour l’enregistrement d’une oeuvre, son exploitation sur disques compacts et fichiers numériques. A contrario, on parle de reproduction « graphique » pour l’édition sous forme de partition.
Enfin, on parle du droit d’adaptation (arrangements, variations, traductions) qui nécessite également l’autorisation des auteurs-compositeurs.
Exemple d’application :
Dans beaucoup de cas, les deux droits sont impliqués :
- Téléchargement Internet :
La mise à disposition des fichiers sur un site web accessible aux clients appartient au droit de représentation.
L’enregistrement de l’oeuvre, le reproduction sur un serveur physique, et la reproduction sur le PC de l’utilisateur dépendent du droit de reproduction mécanique.
- Concert live
Le droit d’exécution publique est lié à la communication de l’oeuvre au public.
L’enregistrement de l’oeuvre relève du droit de reproduction mécanique.
Durée des droits patrimoniaux
Contrairement au droit moral, ils ont une durée de fin fixés à 70 ans après la mort de l’auteur, ou du dernier auteur en cas de pluralité d’auteur. La décompte démarre au 1er janvier de l’année civile qui suit la mort de l’auteur.
Après ce délai, l’oeuvre tombe dans le domaine public. Ainsi, leur exploitation ne requiert plus aucune autorisation sous réserve du droit moral.
On pourrait donc parler ici d’oeuvres ‘libres de droits patrimoniaux ».
Les exceptions
Le code de la propriété intellectuelle accordent des exceptions qui ne nécessitent pas d’autorisations préalables :
- La représentation privée ou gratuite dans le cercle familiale
- La copie privée à usage personnel
- Le reproduction et la représentation dans le cadre de l’enseignement et la recherche
- La parodie
Domaine public
Ainsi chaque année de nombreuses musiques « tombent » dans le domaine public.
Ces musiques sont donc disponibles à l’exploitation sans autorisation nécessaire. Toutefois, un ayant droit (héritier) ou ayant cause (tiers) pourrait faire valoir son droit moral.
Par exemple, l’oeuvre « The Charleston » de James P. Johnson composée en 1923 est devenu publique au 1er janvier 2019.
4- WE COMPOZE et les droits patrimoniaux
WE COMPOZE est un éditeur membre de la SACEM ce qui induit deux choses pour les auteurs-compositeurs :
- Apport des droits patrimoniaux
Nous avons ainsi vu que la représentation et la reproduction d’une oeuvre nécessitaient l’autorisation préalable des auteurs-compositeurs. En adhérent à la SACEM, ces autorisations sont simplifiées. En effet l’auteur-compositeur apporte à la SACEM ses droits patrimoniaux. C’est donc la SACEM qui autorise la diffusion d’une oeuvre auprès d’un diffuseur, indépendamment du droit moral qui pourra toujours être exercé, et qui fixe le prix du montant collecté/reversé. Elle dispose en effet du monopole en France pour la collecte des droits. Par conséquent, elle dispose ainsi d’une force de négociation forte auprès de tous les diffuseurs avec ses 160 000 adhérents.
- Cession des droits patrimoniaux
Les auteurs-compositeurs de la plateforme WE COMPOZE cèdent leurs droits d’exploitation, de reproduction et d’adaptation à l’éditeur (WE COMPOZE) en signant un contrat de cession et d’édition pour les oeuvres sélectionnées. Ainsi, ils confèrent à WE COMPOZE le droit d’exploiter leurs oeuvres, les reproduire et de les diffuser en France et à l’étranger. Tout ceci pour une durée, un territoire, une destination etc. précisés dans le contrat. En aucun cas l’auteur-compositeur ne cède son droit moral qui reste perpétuel, inaliénable et imprescriptible.
A RETENIR :
Exemple : Dans le cadre de la synchronisation en TV d’une musique d’un auteur-compositeur édité par WE COMPOZE
C’est donc WE COMPOZE qui donnera l’autorisation à l’annonceur d’utiliser l’oeuvre et fixera le prix en sa qualité d’éditeur (et de producteur via le contrat de cession de bande master).
Ce sera ainsi la SACEM qui donnera son autorisation à la chaîne de TV pour diffuser l’oeuvre et qui fixera la rémunération à la seconde de l’oeuvre sur cette chaîne.
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